lundi 20 décembre 2010

Le futur centre spirituel et culturel quai Branly


L'équipe de rédaction de "Parlons d'orthodoxie" a regardé rue de Grenelle les dix projets du futur centre.

Voici leur très intéressante analyse, dont je partage les conclusions:

Il est plus que surprenant que certains, tellement incongrus, aient pu passer à travers les mailles de la première sélection !

Deux d’entre eux (N°° 18 /agence Anthony Béchu/ et 45 /studio architecture, Russie) nous ont paru conjuguer au mieux la tradition de l’architecture ecclésiale traditionnelle russe et les impératifs de modernité: emplacement en bord de Seine, à deux pas du musée Branly. Mentionnons également le projet N° 61 /équipe binationale SAAD/.

De très nombreux visiteurs dans les salons de la rue de Grenelle, des familles au complet. Dans leur immense majorité des Parisiens« de souche », soucieux de ce que deviendra la capitale, guère de Russes « blancs » ou autres… ( Nikita et Xenia Krivocheine).

« Le Figaro » daté du 18 décembre donne plusieurs photos et leur adjoint un très pertinent article de Jean-Marie Guénois intitulé « Renouer avec la diaspora ».

En voici la teneur : « Pourquoi construire une nouvelle église orthodoxe à Paris ?

Le futur centre spirituel et culturel quai Branly
Il en existe déjà et les fidèles de cette confession chrétienne ne connaissent pas une expansion telle qu’il faudrait pousser les murs. L’explication vient de la particularité de l’Eglise orthodoxe. Son organisation n’est pas internationale comme l’Eglise catholique mais profondément nationale, au sens de l’appartenance à une terre. Dans le langage théologique, on parle d’Eglise « autocéphale ». Cela signifie que caque Eglise orthodoxe est autonome. Non dans son credo, mais dans son organisation et son gouvernement.

La cathédrale orthodoxe russe qui va donc voir le jour à Paris n’est pas une émanation de l’Eglise orthodoxe en général, mais du Patriarcat orthodoxe de Russie qui est la tête de l’Eglise orthodoxe russe.

Entre le Patriarcat de Moscou et celui de Constantinople

Seconde particularité, l’histoire tourmentée de l’Eglise russe au XX siècle. La révolution russe l’a littéralement déchirée en trois morceaux : les Russes qui ont fui en diaspora dans le monde entier ; d’autres, dont des milliers de prêtres, ont été internés dans des camps ; une troisième partie est restée, a souvent été accusée, à juste titre comme à tort, de « collaboration » avec le régime communiste.

La décision de créer une cathédrale orthodoxe russe à Paris peut donc revêtir trois significations au moins. Elle accompagne un lent mouvement de réconciliation interne entre l’Eglise de la diaspora et sa mère historique, restée en Russie. Les fidèles partis en exil, avaient fini par lui tourner le dos en l’accusant de compromission avec les communistes.

La nouvelle cathédrale correspond aussi à une volonté de l’Eglise orthodoxe russe et du gouvernement russe de renouer avec le réseau des Russes de la diaspora. Souvent Russes blancs, anti-communistes, ils ont un haut potentiel et ont gardé intacte leur culture russe. Ils peuvent beaucoup pour le rayonnement de la Russie.

Enfin, cette construction s’inscrit dans le contexte d’une concurrence symbolique, pour le leadership mondial de l’Eglise orthodoxe, entre le patriarcat de Moscou et l’autre grand patriarcat orthodoxe, plus ancien, de Constantinople. Par exemple, c’est de ce dernier que dépend la cathédrale Saint-Alexandre-Nevsky, rue Daru, à Paris ».

dimanche 19 décembre 2010

Saint Nicolas de Myre, protecteur de la Russie


C'est aujourd'hui la saint-Nicolas,
saint patron de la cathédrale orthodoxe russe de Nice!

Nous ne savons que peu de choses de lui. Il naquit en Asie Mineure, devint évêque de Myre et, à ce titre, il assiste et souscrit au concile de Nicée en 325. Par contre, sa vie posthume est beaucoup plus riche, grâce aux légendes sans doute fondées sur la réputation de sa bonté envers les pauvres et les enfants. Son tombeau devient un lieu de pèlerinage, d'abord à Myre, puis à Bari en Italie où ses reliques furent transportées au XIème siècle pour les protéger des Musulmans. Chaque année, des délégations des Eglises orthodoxes, particulièrement de Russie, viennent se joindre au pèlerinage des catholiques latins, en une rencontre oecuménique significative. Le "bon saint Nicolas" est invoqué aussi bien en Orient où il est le patron des Russes, qu'en Occident où il est le patron des enfants et, si l'on peut parler ainsi, l'ancêtre du Père Noël.

Délivre-nous de toutes nécessités, ô saint Père, par tes prières auprès du Seigneur. O saint pontife Nicolas, port tranquille où trouve un abri quiconque réclame ton secours au milieu de la tempête, prie le Christ qu’il daigne déployer pour nos âmes sa grande miséricorde.
Office orthodoxe des Sobors moscovites

Suit une prière invoquant Saint Nicolas de Myre:

Архиепископу Мирликийскому

О добрый наш пастырю и Богомудрый наставниче, святителю Христов Николае! Услыши нас грешных, молящихся тебе и призывающих в помощь скорое предстательство твое: виждь нас немощных, отвсюду уловляемых, всякаго блага лишенных и умом от малодушия помраченных: потщися, угодниче Божий, не оставити нас в греховнем плену быти, да не будем в радость врагом нашым и не умрем в лукавых деяниих наших: моли о нас недостойных Содетеля нашего и Владыку, Емуже ты со безплотными лики предстоиши: милостива к нам сотвори Бога нашего в нынешнем житий и в будущем веце, да не воздаст нам по делом нашым и по нечистоте сердец наших, но по Своей благости воздаст нам: на твое бо ходатайство уповающе, твоим предстательством хвалимся, твое заступление на помощь призываем, и ко пресвятому образу твоему припадающе, помощи просим: избави нас, угодниче Христов, от зол находящих на нас, и укроти волны страстей и бед возстающих на нас, да ради святых твоих молитв не обымет нас напасть и не погрязнем в пучине греховней и в тине страстей наших: моли, святителю Христов Николае, Христа Бога нашего, да подаст нам мирное житие и оставление грехов, душам же нашым спасение и велию милость, ныне и присно и во веки веков.

Source: "Parlons d'Orthodoxie"

mardi 19 octobre 2010

Une cathédrale russe en plein Paris

Bertrand Gréco - Le Journal du Dimanche

Samedi 16 Octobre 2010


Une cathédrale orthodoxe avec des bulbes multicolores et un dôme doré symbolisant le paradis… L’image est connue sur la place Rouge, à Moscou. Elle est plus inattendue en plein cœur de Paris, à deux pas de la tour Eiffel. Pourtant, l’ambassadeur de la Fédération de Russie en France, Alexandre Orlov, a lancé vendredi un grand concours international d’architecture pour la conception du futur Centre spirituel et culturel orthodoxe russe, quai Branly (7e), à côté du musée du même nom."C’est un projet unique par son emplacement et par sa nature", souligne le diplomate dans un entretien au JDD: "On ne construit pas tous les jours sur les bords de la Seine et encore moins un lieu de culte!" Un projet d’une grande portée symbolique.

En janvier dernier, l’Etat russe a acquis (pour 70 millions d’euros) le siège de Météo France, mis en vente par Bercy, coiffant au poteau l’Arabie saoudite et le Canada, qui convoitaient aussi la parcelle de 4.245 m². L’idée d’implanter ici une cathédrale russe s’est concrétisée au plus haut sommet, directement entre Nicolas Sarkozy et son homologue Dmitri Medvedev. "L’Elysée est très favorable, très intéressé par notre projet, poursuit l’ambassadeur.Le patriarche de Moscou et de toute la Russie est venu en France rencontrer M. Sarkozy, qui lui a donné l’autorisation de construire une église à Paris. Coup de chance ou de la providence, l’Etat français a mis en vente ce bâtiment dans la foulée. Puis la Russie a su faire la meilleure offre."

L’ambassadeur "espère qu’il y aura des bulbes en or"

Outre le "centre de prières", le projet prévoit aussi l’implantation d’un séminaire pour former des prêtres orthodoxes, un jardin central ouvert au public – "avec beaucoup d’arbres" – et surtout un centre culturel polyvalent. Celui-ci sera chargé de promouvoir la "civilisation russe" à l’étranger, à travers des conférences, expositions, projections de films… Il abritera, en lieu et place du bâtiment existant, construit en 1948, une salle de réception, des salles de classe, une bibliothèque, mais aussi un café et des logements. Un concours d’architecture "anonyme" vient donc d’être ouvert, afin de ne pas se "restreindre à quelques noms mondialement connus".

Les architectes candidats devront présenter des esquisses à un jury de quinze personnes. "L’église devra être construite dans la tradition canonique orthodoxe, d’une hauteur limitée à 27 m et d’une contenance de 500 à 600 personnes", précise Alexandre Orlov. Il "espère qu’il y aura des bulbes en or". A l’issue du premier tour, dix projets seront retenus. Le lauréat sera proclamé le 6 mars 2011, pour un démarrage des travaux en janvier 2012 – puisque Météo France restera sur place jusqu’à la fin 2011. La maîtrise d’ouvrage est assurée par le promoteur immobilier français Nexity.

Le budget? "Entre 20 et 30 millions d’euros", estime l’ambassadeur. "Tout dépendra des propositions des architectes. Si elles sont exceptionnelles, on rallongera." Le complexe doit être entièrement financé par des "donateurs russes", qui savent se montrer "très généreux". Ni l’Etat français ni la Ville de Paris ne mettront la main au porte-monnaie. La Russie, elle, se contente d’acheter le terrain et de le rétrocéder aux instances religieuses. Car la constitution russe interdit au gouvernement de financer la construction d’églises. "Nous sommes un Etat laïque, assure Alexandre Orlov. Mais l’Eglise joue un rôle beaucoup plus important dans la vie intime du peuple russe que dans celle des Français. Un élément fondamental de notre identité nationale."

Les vieux démons de l’espionnage

Pourquoi implanter un tel lieu de culte en plein Paris? "La communauté russe de France ne cesse de croître. Entre les enfants des immigrés des années 1920 et les nombreux étudiants, on compte quelques dizaines de milliers de Russes en région parisienne." Il fallait un "lieu symbolique fort", histoire de marquer les esprits, d’affirmer le retour de l’influence russe en Europe. L’ambassadeur préfère le mot "présence" à celui d’"influence". "C’est un symbole de la grande amitié retrouvée entre nos deux pays, entre nos deux peuples." Le dernier geste architectural visant à célébrer l’amitié franco-russe remonte à 1900. C’était le pont Alexandre-III.

Reste l’inquiétude des services secrets français face à l’arrivée de cet ensemble à proximité de l’Elysée. "Une vieille phobie, sourit Alexandre Orlov. Quand M. Poutine est venu inaugurer l’exposition du Grand Palais, le 11 juin, avec M. Fillon, il lui a dit: 'Si vous avez des craintes de ce genre, je vous promets qu’on vous donnera la liste des gens qui travailleront ici, dans une transparence totale.” Aujourd’hui, nous partageons les secrets. Regardez l’achat des Mistral [des porte-hélicoptères, fleurons de la marine française] par la Russie. L’époque a changé. Rassurez-vous, il n’y aura pas d’espions au cœur de Paris."

vendredi 1 octobre 2010

L'interview du prince Nicolas Romanoff dans Nice-Matin

Chers amis,

Voici l'interview du prince Nicolas, publiée dans le journal Nice-Matin le 30 septembre dernier. Le prince y exprime son accord complet quant à la décision de justice française, retournant la cathédrale Saint-Nicolas à la Russie.

Nous pardonnerons aisément au journal de faire descendre le prince du tsar Nicolas II, alors qu'il est l'arrière-petit-fils du tsar Nicolas I.

Eglise russe: le descendant du tsar Nicolas II s’engage

Publié le jeudi 30 septembre 2010 à 09H24 - 4
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A droite, le prince Nicolas de Russie, arrière-petit-fils du tsar Nicolas II, ici, à Rome où il réside, en compagnie de Pierre de Fermor, le président de la toute nouvelle association des Amis de la cathédrale russe de Nice. Le grand-père de ce dernier fut officier des lanciers de la garde impériale russe.(Photos DR et François Vignola)
L’arrière-petit-fils, le prince Nicolas, estime « légitime » le retour de cet édifice religieux dans le giron de la Russie. Il s’en explique dans nos colonnes.

L’ « affaire » de la cathédrale russe de Nice ne pouvait laisser indifférent le descendant des tsars. Voilà quatre ans qu’un conflit oppose la fédération de Russie à l’association cultuelle qui gère ce bien depuis près d’un siècle. Ce bras-de-fer judiciaire s’est conclu par un premier épilogue au début de cette année : le 20 janvier, le tribunal de grande instance a attribué la propriété de l’édifice à l’Etat russe. L’association a immédiatement interjeté appel. La cour d’appel d’Aix devrait se prononcer au printemps prochain. Questions sur cette querelle au prince Nicolas, 88 ans, arrière-petit-fils de Nicolas II, le tsar qui a fait construire la cathédrale.


Etes-vous prétendant au trône de Russie ?


Je suis aujourd’hui l’aîné des descendants mâles de la dynastie des Romanoff. Mais je ne suis pas pour autant prétendant au trône de Russie. Je ne compte pas devenir le prochain tsar ! Je suis simplement le doyen de la Maison impériale de Russie. A ma mort, c’est mon frère Dimitri qui occupera cette position.


Comme avez-vous réagi à la décision de la justice française attribuant la propriété de l’église orthodoxe du boulevard Tsarévitch à la fédération de Russie ?


C’est ce que j’ai toujours souhaité.


La Russie n’a pourtant pas été tendre avec votre famille ! On se rappelle le terrible massacre d’Ekaterinbourg perpétré par les bolcheviques, l’assassinat de Nicolas II, votre arrière-grand-père, de son épouse, ses enfants...


Les temps ont heureusement changé ! Au moment même où l’Union soviétique a cessé d’exister, la Russie est redevenue la Russie. L’époque de l’exil a pris fin. Les jeunes descendants de Russes blancs ont alors commencé à retourner au pays. Dès lors, je me réjouis du fond du cœur que la cathédrale russe de Nice revienne enfin sous le toit commun de l’orthodoxie russe. Elle avait été construite selon le désir de la famille impériale, avec l’appui financier des Russes vivant à Nice. Elle était un bien de la Russie et le redevient naturellement.


Dans le tréfonds de votre conscience, eu égard à ce passé sanglant, ne rejetez-vous pas l’idée que le régime actuel, héritier du précédent, puisse une nouvelle fois déposséder l’ancienne Russie dont vous faites partie ?


Je fais partie de la Russie tout court. De l’ancienne et de la présente qui retrouve enfin les valeurs passées. Les Français devraient-ils avoir honte de la France qui a exécuté les Bourbons ? Non, bien sûr. On ne peut pas « parcelliser » le passé de son pays. On doit tout accepter, le bon et le mauvais.


Quand même, ne pensez-vous pas que cette église pourrait bien avoir appartenu aux Romanoff en personne, selon le principe autocratique voulant que les biens du tsar et ceux de la couronne soient indissociables ?


Il est absurde et inconvenant de penser que le tsar pouvait posséder une église à titre personnel. D’ailleurs, en confirmant par un oukase du 20 décembre 1908 que la cathédrale devait être répertoriée en Russie en tant que propriété du cabinet impérial, Nicolas II a solennellement confirmé qu’il s’agissait d’un bien d’Etat.


Qu’en est-il des nombreux Russes blancs qui ont participé financièrement à la construction de cette église, lui ont légué leurs icônes et autres biens religieux ? Ne seront-ils pas lésés si la cour d’Aix entérine la décision du tribunal de Nice ?


Tous ceux qui ont donné doivent considérer qu’un cadeau est un cadeau. Le plus beau des cadeaux s’il est consenti à une église. Leurs descendants doivent se réjouir que l’église russe de Nice a été classée au patrimoine culturel français. Leurs dons sont devenus inaliénables.


Quel regard portez-vous sur la Russie d’aujourd’hui ?


C’est un régime démocratique qui élit ses gouvernants, chose impensable du temps de Staline ! En Russie, l’Eglise participe aussi à la grandeur de l’Etat. Son renouveau montre le souhait des Russes de retrouver leur splendeur passée.



vendredi 17 septembre 2010

Le métropolite Hilarion: "Nous sommes tous sur le même navire"


Le métropolite Hilarion, Président du département des relations extérieures du patriarcat de Moscou, a accordé une interview àAndré Melnikov et A. Kourilovitch (Nezavissiùaia Gazeta Religia ). Il s’y agit de la coopération avec les chrétiens occidentaux ainsi que de l’attitude l’Eglise à l’égard des zélateurs de l’isolationnisme orthodoxe. Voici des extraits de cette interview : Mgr Hilarion: - « Hier encore les relations entre l’Eglise orthodoxe russe et l’Eglise catholique romaine semblaient relever de la guerre froide. Il y avait cependant, bien sûr, des courtes périodes de réchauffement. Ces relations se sont considérablement améliorées, un dialogue interchrétien constructif a été amorcé. Les catholiques et les orthodoxes s’unissent au nom d’un objectif qui leur est commun : s’opposer à l’offensive du sécularisme en Europe. Nous travaillons ensemble sur les bases d’un dialogue honnête et ouvert en nous inspirant des valeurs sur lesquelles repose la culture européenne à laquelle appartient la culture russe. Nous savons que les partisans de la sécularité s’efforcent d’extirper le souvenir même des fondements chrétiens de la civilisation européenne. A la suite de l’effondrement du système communiste les peuples du monde se sont retrouvés dans un vide politique et culturel. L’homme moderne n’est plus conscient de ses propres racines et sa perception du monde n’est plus d’ordre religieux.
Pour ce qui est des divergences théologiques qui existent entre catholiques et orthodoxes, je peux vous assurer que notre dialogue et notre coopération avec l’Eglise catholique n’ont pas pour but d’unir les deux Églises au prix d’un compromis dogmatique. L’esprit conciliaire qui anime l’Eglise orthodoxe a rejeté à plusieurs reprises cette approche qui n’a aucun avenir. Au contraire, l’Eglise d’Orient a toujours insisté, tout en acceptant le dialogue avec l’Occident, sur la mise en œuvre dans leur intégralité des décisions des conciles œcuméniques ainsi que sur la fidélité à la Tradition qui nous a été léguée par les Pères de l’Eglise. La séparation avec Rome n’a cependant pas empêché les orthodoxes d’envoyer aux XVII-XVIII siècles des étudiants dans les écoles d’Italie. Plusieurs évêques remarquables de l’Eglise orthodoxes russe ont été ainsi formés en Italie. Face aux conquêtes turques et arabes Byzance avait sans hésiter sollicité le soutien de l’Occident chrétien. Nous revoilà face à l’agression de la propagande antichrétienne qui cherche la perte de nos concitoyens et qui veut plonger nos sociétés dans la barbarie. Nous revoilà donc tous sur le même navire ». - Nous avons le sentiment que le rapprochement de ces derniers mois entre l’Eglise orthodoxe russe et les catholiques polonais se base sur un anticommunisme commun et la condamnation conjointe du passé stalinien. Est-ce que le dialogue chrétien a vocation de devenir le contre-poids des forces de gauche ? Sera-t-il apte à prévenir la revanche du communisme en Europe ? - « Ces deux dernières décennies les relations russo-polonaises ont été loin d’être simples. Mais les opinions des deux pays étaient conscientes de la nécessité d’un rapprochement y compris dans le domaine ecclésial. L’Eglise orthodoxe en Russie et l’Eglise catholique en Pologne ont chacune une place plus qu’importante dans la vie de nos pays. Nous avons en commun décidé de contribuer à l’amélioration de nos relations. Il fallait pour cela procéder à une analyse des raisons qui faisaient obstacle à ce rapprochement ainsi que des évènements qui nous ont séparé et induit un esprit de méfiance et d’incompréhension réciproques. Les guerres soviéto-polonaises de 1920-1921 et de 1940 ainsi que le partage de la Pologne en vertu du pacte Molotov-Ribbentrop ont fait dans les deux pays l’objet de débats approfondis et passionnés. Il en est de même du drame de Katyn avec l’assassinat de plus de vingt mille prisonniers de guerre polonais. Il nous est à tous devenu évident que l’idéologie communiste est responsable de l’agression soviétique contre la Pologne au début des années vingt du dernier siècle. La propagande bolchevique présentait ce conflit comme étant le début de la révolution mondiale. Il nous est à tous devenu évident que l’idéologie communiste doit assumer la pleine responsabilité de la méfiance qui s’est instaurée dans les relations entre nos deux peuples. La question est venue se poser de savoir sur quelles bases nous pouvons mettre en place de nouvelles relations fondées sur la confiance ? La réponse était évidente : seule la tradition chrétienne enracinée dans nos mentalités et dans notre façon de penser pouvait nous faciliter ces efforts. Je ne crois pas qu’il faille opposer le dialogue entre les Églises chrétiennes aux tendances politiques de gauche. Ce sont des phénomènes de nature différente. Je ne vois actuellement rien qui puisse faire craindre une revanche communiste en Europe. Cette idéologie abominable relève du passé, avant de disparaître elle a détruit des centaines de millions de vies. En ce qui concerne les Églises protestantes les tendances libérales y sont ces dernières décennies devenues prédominantes dans la majorité de leurs communautés en Europe et en Amérique du Nord. Les normes traditionnelles de l’éthique chrétiennes y sont remises en question, l’homosexualité y devient admise en tant que mode vie alternatif. Les Saintes Écritures nous disent clairement qu’une telle approche est en violation flagrante de la morale chrétienne et de la doctrine de l’Eglise. Les Églises protestantes procèdent systématiquement à l’ordination pastorale des femmes, c’est là une remise en cause des fondements mêmes de l’anthropologie chrétienne. Il s’agit de la place et du rôle de la femme dans l’Eglise, la famille et la société. Les responsables des communautés protestantes se sont manifestement inspirés dans ces pratiques de ce qui se fait dans la société séculière. Ils admettent tout ce qui n’est pas considéré comme répréhensible par le "sécularisme laïc". Certaines Églises protestantes cessent d’être des entités spécifiquement religieuses et se comportent en organisations de la société civile dont la raison d’être est dans la lutte pour la justice sociale. Cela rend malheureusement difficile notre dialogue avec les protestants. A un tel point que l’Eglise orthodoxe russe s’est vue ces dernières années contrainte d’interrompre son dialogue avec plusieurs grandes communautés protestantes d’Europe et d’Amérique du Nord. Mais nous savons que nombreux sont les croyants protestants qui préfèrent la vision des orthodoxes et des catholiques à celle de leurs responsables. Ces croyants sont considérés par leurs communautés comme étant « des fanatiques, des fondamentalistes, des sectaires ». Or, c’est avec ces protestants que nous sommes disposés coopérer dans le cadre de divers projets, y compris celui d’une nouvelle évangélisation de l’Europe" - Une récente enquête d’opinion a montré que la majorité des clercs catholiques d’Autriche se prononcent contre le principe du célibat. S’agit-il d’un renoncement condamnable à une tradition multiséculaire ? - « Le célibat obligatoire du clergé a été introduit par l’Eglise occidentale au XII siècle. Il n’existait pas avant. Les Églises orientales s’en tiennent à la pratique ancienne qui permet d’ordonner prêtres des hommes mariés. L’Orient chrétien a toujours eu une attitude critique à l’égard du célibat des prêtres existant dans l’Eglise de Rome. Les orthodoxes estiment que le principe du célibat est un problème interne de l’Eglise catholique romaine. Cependant nous ne pourrons qu’approuver la révocation de ce principe si elle survenait en la considérant comme le retour à la tradition des premiers siècles ». -Le rapprochement entre les Eglises orthodoxes et les catholiques romains suscite chez certains croyants une hostilité à l’égard de l’œcuménisme. Nous l’avons constaté lors de la visite à Chypres du pape de Rome. Des évêques de l’Eglise orthodoxe russe avaient alors fait entendre leur mécontentement. Est-ce que ces voix protestataires peuvent faire obstacle au dialogue avec les chrétiens occidentaux ? - « Il y a au sein de chacune des Eglises orthodoxes locales des fidèles mécontents de ce rapprochement. Ce sont le plus souvent des personnes qui ne connaissent pas suffisamment les autres confessions chrétiennes et les modalités de la coopération avec elles. C’est un discours qui souvent n’est pas d’ordre théologique mais de nature psychologique et politique. Nous ne parlons pas tout à fait la même langue. Cependant nous restons à l’écoute des adversaires des contacts interchrétiens et nous tenons compte de leurs positions lors de l’élaboration des documents conciliaires. Je crois que le nombre de ces « zélateurs » va aller décroissant car la Russie occupe une place de plus en plus importante dans la communauté mondiale. La quantité de mariages interconfessionnels est impressionnante, des millions d’orthodoxes résident hors du pays. Nos croyants connaissent ainsi mieux les chrétiens non orthodoxes. « Ces zélateurs » ont toute leur place dans le combat que nous menons contre le sécularisme, nous avons là beaucoup à faire ensemble. Traduction Nikita Krivochéine, "Parlons d'Orthodoxie"

dimanche 5 septembre 2010

Samedi 4 septembre 2010
Ce jour dans la résidence de travail du Patriarcat de Moscou et de toute la Russie, le patriarche Cyrill a ordonné l'archimandrite Nestor (Sirotenko) au titre d'évêque de Kafsk, vicaire de l'exarchat de Korsoun.
(Source: Service de presse du Patriarchat de Moscou et de toute la Russie)
Aksios! Aksios! Aksios!
Ivan Serguéevitch

jeudi 26 août 2010

La première dame de la Fédération de Russie a visité l’église Saint Michel à Cannes


Madame Svetlana Medvedev se trouvant à Cannes dans le cadre de l’année croisée
France-Russie a visité l’église orthodoxe russe saint Michel où est inhumé le grand-duc
Nicolas Romanov. Cette église, l’une des plus belles églises russes en France,
a été bâtie en 1894. La comtesse Sophie Thornby, petite-fille d’Alexandre Pouchkine,
a été l’une des premières paroissiennes de l’église Saint Michel. Madame Medvedev
est descendue dans la crypte où est enterré le grand-duc Nicolas Nikolaevitch Romanov,
commandant en chef de l’armée russe à la fin de la première guerre mondiale.
C’est également là que se trouve la sépulture de la résistante française d’origine russe
Hélène Vagliano qui a été fusillée par les Allemands quelques jours avant la libération
de la ville en août 1944.

Le père Maxime Massalitine, recteur de la paroisse, a précisé que l’église était la
propriété du patriarcat de Moscou et se trouve sous la juridiction de l’Eglise orthodoxe
Russe Hors Frontières qui s’est unie avec l’Eglise russe patriarcat de Moscou en 2007
ayant conservé son autonomie. L’église est réputée pour le beauté de ses icônes.
Madame Medvedev a manifesté un grand intérêt pour l’histoire de l’église et la vie
paroissiale, s’est enquise de la possibilité d’organiser des cours paroissiaux en langue
russe. Cette visite a dit le père Maxime, a pour nous une très grande signification,
elle montre que la Russie renaît et que notre patrie manifeste son intérêt pour les foyers
de la spiritualité et de la culture russes à l’étranger.

RIA Novosti Traduction "P.O." Reproduit à partir du site "Parlons d'Orthodoxie"

samedi 31 juillet 2010

Le déjeuner de Rougemont


J'ai eu l'honneur et le plaisir de déjeuner ce mercredi 28 juillet avec notre président d'honneur, S.A.I. le Prince Nicolas de Russie.

L'entretien s'est déroulé à Rougemont, avec en arrière plan la grandeur paisible des montagnes suisses.

Le Prince, doyen de la maison impériale de Russie, est l'arrière-petit-fils du Tsar Nicolas Ier. il m'accueille avec la simplicité naturelle qui est l'apanage des personnes bien nées. Je suis frappé, lors de notre discussion, par la vivacité de son esprit. Âgé de quatre-vingt-huit ans, il s'exprime avec l'aisance fluide d'un homme qui excelle dans l'exercice du langage. Nous parlons de la Russie bien sur. Elle est sa vie. Sa passion. Et nous parlons de la cathédrale. L'entretien va être publié, je n'en dirai donc pas plus. Pour le moment du moins. Juste un mot toutefois: clarté. Car c'est le mot qui symbolise le mieux la pensée du chef actuel de la dynastie des Romanoff. Clarté spirituelle, et clarté politique. Sa confiance en l'avenir d'un pays qui n'a jamais cessé d'être le sien. L'amour qu'il éprouve pour son peuple. Et la confiance absolue dans laquelle le conforte le renouveau de l'église russe. Confiance en nous tous.

Car c'est un message d'unité et de réconciliation qu'il nous transmet. Que nous devons honorer en en respectant la portée. Nous nous y engageons.

Merci, Monseigneur, pour cette belle journée, qui était une leçon de vie.

mercredi 28 juillet 2010

Saint Vladimir

Ce jour du 28 juillet l'église russe orthodoxe célèbre le saint, égal des apôtres, Vladimir prince de Kiev.
Nous devons nous souvenir que cela aurait été la fête de Monseigneur Vladimir (Tikhonitski) (de bien heureuse mémoire) évêque de Nice et Métropolite de l'église orthodoxe d'Europe occidentale, et celle de l'archiprêtre Vladimir (Yagello) qui lui fût recteur de notre paroisse, trop brièvement.
Tous doivent se souvenir que le Saint Prince Vladimir a amené la religion Chrétienne dans la "Rus"du 11e siècle, que de ce fait il a créé un état chrétien oriental initial; son action a créé l'État russe, a développé la culture russe.
Bonne fête à tous les Vladimir qui liront ce modeste texte.
Ivan Serguéevitch

jeudi 22 juillet 2010

Emprunts russes : vers une relance de l’affaire ?

La décision de justice reconnaissant la propriété de la Russie sur l’Eglise russe St-Nicolas de Nice en janvier dernier et l’achat au printemps du terrain de Météo France à Paris, pourraient relancer le sinistre feuilleton des « emprunts russes » qui avaient ruiné des centaines de milliers de Français et altéré l’image de la Russie en France depuis plus de 90 ans.


Dimitri de Kochko, pour La Russie d’Aujourd’hui

L’AFIPER (Association Fédérative Internationale des Porteurs d'Emprunts Russes), qui représente quelque 400 000 porteurs de titres obligataires russes d’avant 1917, a reçu en mai une réponse négative de la présidence russe à sa lettre ouverte. Compte tenu des nouveaux développements, elle ne renonce pas aux possibilités d’une action en justice pour tenter de récupérer une partie des biens de ses mandants. Mais contre qui et auprès de qui ? (voir les encadrés ci-dessous)

Les tribunaux français, y compris le Conseil d’Etat, tout en reconnaissant le droit des personnes spoliées à se plaindre, n’acceptent plus d’examiner leurs plaintes, que ce soit contre la France ou contre la Russie. Dans les deux cas, la justice s’appuie sur un accord diplomatique franco-russe censé régler la question et conclu en 1996-1997. Le Parlement a ratifié l’accord et une loi et un décret français en fixent les modalités d’application. Schématiquement, moyennant une « soulte » de 400 millions de dollars versés par la Russie, les deux parties considèrent qu’au niveau des Etats le règlement des dettes antérieures à 1945 est « soldé de tout compte ». Les associations, qui n’ont pas été consultées lors de la négociation de cet accord, ont beaucoup de critiques à faire sur ce dernier (voir encadré 2), à commencer par le montant de la « soulte » compensatoire. Elles n’ont pas été suivies non plus par la Cour européenne des droits de l’homme qui, en mai 2001, a estimé qu’un épargnant devait assumer les risques inhérents à tout placement financier. En fait, il ne reste aux porteurs de titres que de s’adresser aux tribunaux russes, mais sans aucun appui diplomatique français, puisque l’accord de 96-97 l’interdit. En vertu de ce même accord, les tribunaux russes refusent d’examiner les plaintes étrangères sur les dettes d’avant 1917 et renvoient les plaignants aux autorités françaises…

C’est là que l’affaire de St-Nicolas peut présenter une possibilité de rebondir pour ces associations car la justice française a reconnu que la Fédération de Russie est propriétaire de la cathédrale de Nice, construite sous les tsars. Le Tribunal de Grande Instance de Nice a rejeté l’argument de l'Association cultuelle orthodoxe russe de cette ville qui utilise la cathédrale depuis 1923. Elle avait repris le bail emphytéotique de 99 ans signé en janvier 1909 et donc arrivé à son terme le 31 décembre 2007. Elle voulait faire reconnaître une « usucapion », c'est-à-dire la reconnaissance d’un droit de propriété par l'occupation durable du bien. Désavouée, l’Association cultuelle a interjeté appel.

Pour les porteurs d’emprunts russes, l’intérêt est dans la reconnaissance par un tribunal français d’un litige sur une question de propriété antérieure à 1917, malgré l’accord diplomatique de 96-97. Comme il y a reconnaissance par la Justice de la continuité de l’Etat russe actuel par rapport à celui des tsars, ce qui était déjà acquis au niveau diplomatique par deux accords, l’un avec Gorbatchev en 1990 et l’autre avec Boris Eltsine en 1992, certains membres des associations voudraient arguer sur le fait que si les dettes d’avant 1945 entre les Etats russe et français ne sont plus exigibles, pourquoi la propriété d’un bien immobilier de l’Etat russe d’avant 1917 lui serait-elle reconnue, alors que ses obligations ne le seraient pas ?
Selon la réponse que la Justice donnera, certains des membres des associations qui s’expriment sur les blogs pensent qu’il serait possible de faire saisir les nouvelles acquisitions météorologiques parisiennes de l’Etat russe. … Mais la Russie peut faire valoir qu'il y avait de quoi rembourser les petits porteurs depuis longtemps.

Petite histoire de locomotives dorées
Après la guerre de Crimée, dans les années 1860, le pouvoir russe a tiré les leçons du conflit qui lui a été défavorable en raison de son incapacité à faire parvenir rapidement aux défenseurs de Sébastopol des équipements et des munitions. Il fallait des chemins de fer à l’énorme pays qui venait enfin d’abolir le servage et se lançait (déjà) dans un programme de modernisation et d’industrialisation exigeant d’énormes investissements. Des emprunts sur les marchés internationaux ont commencé à être lancés. A noter, et c’est un aspect peu connu, que ces obligations étaient garanties à l’époque par des cautionnements en or russes, compte tenu du risque pays de la Russie à l’époque.

En 1880, on est passé à une vitesse de croisière en France. Côté russe, le tsar Alexandre III, préoccupé par la faiblesse des voies de communication et chemins de fer, vise d’abord l’Allemagne pour lancer un emprunt. Il se heurte à la méfiance de Bismarck qui fait capoter l’opération à Berlin. Le tsar fait transporter l’or de caution et les titres restants à Paris. Neuf ans après la défaite de 1871, la France est à la recherche d’alliés solides et « pense toujours, sans en parler jamais » à l’Alsace-Lorraine, occupée par les Prussiens.

L’accueil des premiers titres est triomphal. Si bien qu’en 1888, quatre emprunts de 500 millions de francs or sont émis et couverts. Ils seront suivis de bien d’autres. En 1891, l’alliance franco-russe complète le tableau. Armand Fallières qui sera président de la République après 1906, lance un « prêter à la Russie, c’est prêter à la France ». On construit le Pont Alexandre III. Par patriotisme, autant que par intérêt pour des obligations qui garantissent une bonne rente à une époque où il n’y a ni retraite ni sécurité sociale, 1,6 million de porteurs, qui ont parfois tout vendu pour acheter des emprunts russes, en ont acquis pour 12 milliards de francs or en 1914 (quelque 19 milliards d’euros, selon les calculs des associations de porteurs). A noter que sur cette somme, les petits porteurs représentent environ un tiers, le reste étant détenu par des institutionnels, essentiellement des banques françaises et allemandes.

Pour faire la « com. » autour des obligations russes et soutenir leur cours, parfois artificiellement, un affairiste nommé Arthur Rafalovitch est appointé à Paris par le ministère des Finances russe. Ses aventures sont contées en détail par feu le professeur Vladlen Sirotkine, spécialiste russe de la question des avoirs russes à l’étranger. Rafalovitch disposait d’importants comptes en banque en France alimentés par le ministère russe, qui sont restés là après la Révolution et qui ont disparu… Le même Sirotkine, dans ses écrits, révèle qu’au moment de la déclaration de guerre de 1914, le ministère russe des Finances a mené une opération éclair pour retirer les avoirs russes dans les banques à Berlin pour les placer à Paris. Tout s’est fait en trois jours. On ne sait pas où est cet or.

De même, selon le même auteur, la famille impériale des Romanoff a envoyé de l’or via le Japon, en France et en Angleterre en cautionnement d’achats d’armements. Mais aussi, après la Révolution de février 1917, pour s’assurer un exil confortable à l’étranger, dont ils n’ont jamais pu profiter. On retrouve cet or-là lors des tentatives vaines de la fausse Anastasia, pseudo fille survivante du tsar Nicolas II, de le récupérer à Londres. En revanche, c’est cet or-là qui a servi de monnaie d’échange à Mikhail Gorbatchev pour conclure un accord avec Londres et indemniser dès 1986 les porteurs anglais d’emprunts russes…

La Révolution d’octobre survient en Russie en 1917, suivie d’une guerre civile terrible. Pour fermer le front avec les Allemands, le nouveau pouvoir signe la paix de Brest-Litovsk, « sans voir » les conditions imposées. Une des conditions est le versement de 47,5 tonnes d’or en lingots plus des monnaies et titres aux Allemands.

Les 47,5 tonnes d’or (les titres et monnaies ont été « perdues » à Berlin) sont prises par les Français après la victoire du 11 novembre 1918. Après déduction d’une part envoyée en Angleterre, elles seront confiées « provisoirement » à la France par le Traité de Versailles. Ce dernier annule les effets de la Paix de Brest Litovsk. L’or a été placé dans les caves de la Banque de France « hors bilan », avant restitution à la Russie. Celle-ci n’a jamais eu lieu.
Pendant la guerre civile en Russie, le chef des armées blanches de l’est, l’amiral Koltchak, envoie au moins 11 tonnes d’or à des banques françaises à Shanghai et une autre partie au Japon.

Selon le professeur Sirotkine, qui cite aussi le meilleur spécialiste français de la question, Joël Freymond qui a écrit « Les Emprunts Russes - histoire de la plus grande spoliation du siècle », et un spécialiste allemand Helmut Welter, les autorités et les banques françaises disposaient en 1923 « d’au moins 93,5 tonnes d’or en lingots, monnaies et métaux précieux » qui lui auraient largement permis d’indemniser les petits porteurs. Une autre voie a été choisie : faire retomber l’exclusivité de la responsabilité sur les « bolcheviques au couteau entre les dents » et faire fondre au plus vite une bonne partie de l’or pour changer les aigles à deux têtes russes par les symboles républicains et les vendre à Londres et en Amérique. D’autant plus rapidement, que les pourparlers pour la reconnaissance diplomatique de l’URSS avaient commencé.

En 1924, la France et l’URSS établissent des relations diplomatiques. Une partie des lingots russes ont déjà été fondus et vendus. Il en reste. Selon la « Voix des emprunts russes », le sénateur du Var François Trucy en a trouvé trace, et plus près de nous, une émission de TF1 en avril 2009 parle de la présence d’or russe dans les caves de la Banque de France. Lors des journées du patrimoine de 2008, au moins un lingot frappé de l’aigle à deux têtes du temps des tsars a été vu par les visiteurs et les téléspectateurs de journaux télévisés. C’est en ayant à l’esprit l’or et les valeurs russes qui se trouvent en France qu’on peut comprendre pourquoi l’accord franco-russe de 1996-97 parle de « soulte », c'est-à-dire d’une différence, pour qualifier les 400 millions versés par la Russie et qui ne représentent en effet qu’une petite partie de ce qui serait dû aux petits porteurs et que l’APFER estimait généreusement en 1995 à quelque 25 milliards d’euros au total.

Les accords de 96-97 et leurs suites
Soucieuse de revenir dans « le monde civilisé », selon les formulations de l’époque en Russie, et de reprendre pied sur des marchés financiers, indispensables pour aider à combler le déficit chronique de l’Etat russe à ce moment-là (qui se terminera par le défaut de paiement d’août 1998), le gouvernement démocratique de Viktor Tchernomyrdine, Premier ministre de Boris Eltsine, veut régler définitivement la question du remboursement des « obligations pourries », vieilles d’une centaine d’années qui traîne entre la Russie et la France depuis 1917. Les deux pays signent les accords du 26 novembre 1996, complétés par ceux du 27 mai 1997. Le texte de ces accords est tenu secret. L'AFPER l’avait rendu partiellement public mais en demande toujours la publication officielle. L’accord a été avalisé au Parlement le 30 décembre 1999 et le décret d’application publié le 23 août 2000. Tout observateur de la vie publique française relèvera que de telles dates ne prêtent pas à de larges débats dans l’opinion !

L’accord prévoit non pas un remboursement unilatéral des emprunts russes par la Russie mais la compensation des créances réciproques entre les deux pays et le versement par la Russie d'une « soulte » de 400 millions de dollars. Ainsi, les dettes des institutions et des banques françaises vis-à-vis de la Russie sont aussi prises en charge de fait par de l'argent destiné aux petits porteurs français d'emprunts russes. Ce montage explique que ladite soulte ne représente que 1% de la valeur des emprunts russes encore en circulation, selon les associations de porteurs. Ces accords stipulent notamment que la Russie renonce à demander la restitution des 47 tonnes de Brest-Litovsk. Cet or n’a jamais servi à dédommager les porteurs français d'emprunts russes. De leur côté, les Français prennent la responsabilité de régler les contentieux en France.

Les Russes, en difficulté à l’époque, ont mis trois ans à payer les 400 millions de dollars. Les services fiscaux français ont lancé une opération de recensement des ayants-droits. Et là encore, un élément peu clair a été mentionné par des journaux de l’époque et les associations de porteurs : en mars 99, trois mois après la fin du recensement, le ministère de l’Économie annonce 135 000 porteurs de 3,8 millions de titres d’emprunts russes. Les porteurs soupçonneux se rassurent un peu. Et puis, six mois plus tard, Bercy « rectifie » : on a maintenant 312 000 porteurs avec … 9,2 millions de titres. Des banques off-shore, des paquets de titres ayant appartenu à des juifs déportés par les nazis apparaissent mystérieusement.

Quelques députés socialistes protestent : le Premier ministre est Alain Juppé. Il est remplacé par Lionel Jospin après une dissolution mémorable. La commission Paye, qui avait été chargée de proposer un mode de répartition, est dissoute. Le décret d’application est publié en août. Les petits porteurs ont bien peu de chances d’y voir clair un jour. D’autant que l’accord, tout en reconnaissant le droit aux porteurs d’ester en justice, les en empêche de fait, puisque l’accord diplomatique entre les deux États stipule que les comptes sont soldés. D’où la référence à l’immunité diplomatique des tribunaux français et le renvoi à la responsabilité française de la part des autorités russes…